7.10.06

L'abîme

"Un télégramme de sa fille m'apprit, le 9 septembre 1898, la mort de Mallarmé. Ce me fut un de ces coup de foudre qui frappent d'abord au plus profond et qui abolissent la force même de se parler. Ils laissent notre apparence intacte, et nous vivons visiblement ; mais l'intérieur est un abîme. Je n'osai plus rentrer en moi où je sentais les quelques mots insupportables m'attendre. Depuis ce jour, il est certains sujets de réflexion que je n'ai véritablement jamais plus considérés. J'avais longuement rêvé d'en entretenir Mallarmé ; son ravissement brusque les a comme sacrés et interdits pour toujours à mon attention."

Paul Valéry - Variétés